Sexisme et festivals. Jusqu’où peut aller la fête ?

sexisme_articleLa fin d’année académique et l’été sont, comme à l’accoutumée, marqués par un certain nombre de festivités : des bals de fin d’année aux nombreux festivals, les occasions ne manquent pas. Et s’il faut bien entendu en profiter, soulevons que ces fêtes riment trop souvent avec un sexisme rampant voir explicite.

Par Emily (Namur)
Le sexisme, un outil pour rameuter la foule et le fric
Sur les réseaux sociaux comme en rue, il n’est pas rare de tomber sur l’affiche d’une soirée ouvertement sexiste. Une question peut alors venir à l’esprit : quel est le lien entre l’évènement et l’affiche ? Souvent, il n’y en a pas, si ce n’est qu’il s’agit d’un outil de vente efficace pour maximiser les profits des organisateurs. Le nom choisi pour certaines soirées a également de quoi interloquer, comme pour celle fin juin intitulée ‘‘F*** me, I’m student’’(1). Si chacun doit pouvoir se vêtir comme il l’entend et mener la vie sexuelle qu’il souhaite dans le respect de son/sa/ses partenaire(s), ces allusions au sexe semblent trop souvent se transformer en un sentiment d’obligation, voir une contrainte physique.
Heureusement, tous les évènements ne fondent pas leur promotion sur le sexisme via une hypersexualisation. Pourtant, le sexisme y reste présent. Sur les festivals, les chanteurs/euses comme les sponsors le véhiculent bien souvent. Pour les premiers, l’aliénation est parfois si forte que ce moyen est envisagé comme la seule manière d’être reconnu ou comme une étant issue du libre arbitre. Cependant, le poids de la société de classe qui marchandise le corps des femmes et les considère comme subalterne est bien là. Pour les seconds, le sexisme est instrumentalisé. Lorsque sur les festivals, les publicistes engagent des jeunes femmes aux mensurations se rapprochant de la poupée Barbie pour vous brumiser lors des fortes chaleurs et vous proposer des massages entre deux concerts, les corps de ces femmes sont utilisés comme instruments de marketing sexy afin que le produit promu leur soit associé et que les ventes s’en retrouvent augmentées. Notons que les sites pornos tentent également leur entrée comme sponsor de festival comme de club de foot. Tout cela renforce les stéréotypes et l’image de la femme-objet – voir objet sexuel – dans la culture dominante.
Luttons ensemble contre la culture du viol
Le sexisme et l’hypersexualisation ne sont pas sans conséquence. Avec des soirées estampillées ‘‘F*** me, I’m student’’, comment être surpris du manque de clarté concernant le consentement pour des relations sexuelles? Un flou est observé chez beaucoup, hommes comme femmes. Aliénés par la société capitaliste qui marchandise tout (et tous !), certains sont amenés à assimiler une mini-jupe à un ‘‘je suis open’’, alors même que la personne exprime le contraire (ou n’a rien eu le temps de dire du tout).
Si une fille danse et boit de l’alcool et qu’elle se retrouve agressée sexuellement, beaucoup diront qu’elle a cherché les problèmes, voir qu’elle le voulait. Refusons cette culture du viol où la victime est placée comme responsable de ce qui lui est arrivé! Refusons la banalisation des agressions (harcèlement, mains baladeuses, viol,…)! Ce n’est pas parce qu’elles sont courantes – 46% des Belges (hommes et femmes) estiment avoir été victimes de violence sexuelle grave au cours de leur vie – qu’elles en sont moins graves. Pourtant, 24,4% des femmes victimes de violences sexuelles graves finissent par les banaliser(2). Rien de surprenant dans un contexte où les violences conjugales ne sont désormais plus considérées comme une priorité par la police(3) en raison des restrictions budgétaires. La question de ce qu’est un consentement doit pouvoir être discutée sereinement, entre autres dans un cours d’éducation affective et sexuelle. Si une personne dit ne pas vouloir de sexe, c’est qu’elle n’en veut pas, et ce y compris si elle a dit le contraire plus tôt et que cela peut paraitre frustrant ou encore dans le cadre d’un couple. Et si l’alcool ou la drogue empêche une personne de s’exprimer sur ce qu’elle veut ou non, il faut alors considérer cela comme un non catégorique.
Abattons le système capitaliste qui cultive le sexisme
L’industrie du divertissement et du spectacle ainsi que celles de leurs sponsors sont gérées dans le but de rapporter un maximum d’argent à leurs actionnaires. Pour cela, l’utilisation du corps de la femme comme objet-sexuel ou de marketing ne leur pose aucun problème. Donnons-nous les moyens de débarrasser notre société du sexisme! Cela n’est possible qu’en nous renversant le système capitaliste pour mettre en place les bases matérielles pour venir à bout du sexisme, en prenant collectivement le contrôle de l’industrie du divertissement de même que des secteurs clés de l’économie, pour que l’ensemble des travailleurs et des usagers puisse les gérer démocratiquement. C’est un combat de longue haleine, que nous mènerons entre autres sur les festivals cet été.
(1) https://www.facebook.com/events/882311141791458/
Plus de 5000 participants sur FB et 24.000 invités pour cette soirée du 21 juin à Braine-l’Alleud.
(2) Amnesty Belgique : http://www.amnesty.be/doc/agir-2099/nos-campagnes/le-viol-en-belgique/article/belgique-1-femme-sur-4-violee-par
(3) http://www.lalibre.be/actu/belgique/la-violence-conjugale-fait-debat-5543ba5235704bb01c115073