Etats-Unis : Quel avenir pour le mouvement ‘Occupy’ ?

Quelle devrait être la prochaine étape à franchir pour le mouvement?

En quelques semaines, le mouvement ‘Occupy’ a changé la face de la politique américaine. Bien plus de 100 villes connaissent actuellement des occupations, et des militants prévoient des occupations ou des actions de solidarité dans plus de 1.000 autres. Des centaines de milliers de personnes ont participé aux manifestations. Des millions de travailleurs se sont clairement identifiés à ces fameux ‘99%’ qui s’opposent au 1%, et ont été inspirés par la position audacieuse adoptée contre Wall Street et le système politique contrôlé par les entreprises.

‘‘Nous sommes en train de gagner. Bien sûr, nous n’avons pas pris les institutions gouvernementales en main, ni même n’avons gagné de réformes concrètes ou à venir avec des institutions solides pour défendre nos acquis. Nous ne sommes même pas près d’en finir avec la lutte ou avec la création du monde dans lequel nous voulons vivre. Mais – aux côtés des révolutionnaires à travers le monde – nous avons contribué à libérer le potentiel caché et endormi de millions de personnes, prêtes à croire à nouveau qu’il existe une alternative’’, a expliqué Yotam Marom, un des principaux organisateurs de l’occupation de Wall Street (Alternet.org, 13 Octobre, 2011).

‘‘Notre mouvement est composé de gens qui luttent pour des emplois, des écoles, l’allégement de leur dette, des logements équitables et pour de bons soins de santé. Nous résistons à la destruction écologique, à l’impérialisme, au racisme, au patriarcat et au capitalisme. Et cela, nous le faisons tous de façon participative, démocratique, féroce et inébranlable.’’

En quelques semaines, le mouvement ‘Occupy’ a changé la face de la politique américaine. Bien plus de 100 villes connaissent actuellement des occupations, et des militants prévoient des occupations ou des actions de solidarité dans plus de 1.000 autres. Des centaines de milliers de personnes ont participé aux manifestations. Des millions de travailleurs se sont clairement identifiés à ces fameux ‘99%’ qui s’opposent au 1%, et ont été inspirés par la position audacieuse adoptée contre Wall Street et le système politique contrôlé par les entreprises.

Dès les premiers jours du mouvement, les membres de Socialist Alternative ont énergiquement aidé à organiser les occupations dans les villes où ils étaient présents, en faisant des propositions concrètes pour des actions de sensibilisation, etc. Nous avons ajouté nos voix aux cris proclamant ‘‘qu’un autre monde est possible », en soulignant fortement le fait que cela exigeait une transformation de la société vers le socialisme démocratique.

Aujourd’hui, aux côtés de nombreux autres dans le mouvement, nous sommes aux prises avec cette question cruciale : que faire maintenant ?

 

Quelle prochaine étape?

Premièrement, nous devons reconnaître que, tout d’un coup, nous sommes devenus une force avec laquelle il faut compter. L’establishment politique et médiatique a tout d’abord tenté d’ignorer les occupations, puis de les discréditer, et ensuite de physiquement les réprimer. Mais maintenant, chaque institution de la classe dirigeante, de la campagne présidentielle d’Obama au Tea Party, essaye de réorienter sa stratégie politique pour répondre à cette explosion sociale.

Notre succès pour briser le black-out des médias et pour gagner un large soutien pour notre mouvement a également attiré l’attention du Parti Démocrate. Avec le début la campagne présidentielle, les Démocrates courtisent le mouvement. Obama nous a offert de belles paroles, tout en quémandant en même temps des millions de dollars de Wall Street pour sa campagne. Nous devons être bien clairs : le Parti Démocrate n’est pas l’ami des mouvements sociaux. Ils ne nous tendent la main que pour s’attirer le mouvement et pour canaliser nos énergies vers leur campagne électorale pro-capitaliste.

Nos amis sont ailleurs, avec les autres mouvements sociaux, et plus particulièrement le mouvement ouvrier. Le mouvement d’occupation doit construire des liens plus étroits avec les luttes sociales et économiques. Nous devons relier les étudiants sur les campus universitaires aux préoccupations des travailleurs et des pauvres qui souffrent tous de cette récession économique dévastatrice.

Le 15 octobre dernier, la journée d’action internationale a attiré plus de 25.000 manifestants à Manhattan, et un nombre encore plus grand à travers l’Europe. Maintenant, Adbusters – le magazine qui a lancé l’appel d’Occupy Wall Street – propose des protestations mondiales le 29 octobre pour revendiquer une « taxe Robin des bois » sur les transactions financières. [Cet article a été publié le 28 octobre, NDLR]

De tels appels pour une action coordonnée autour de points de revendication clairs et précis vont dans la bonne direction. Mais, tandis que la ‘‘taxe Robin des Bois’’ peut être une idée populaire chez les militants. Mais pour attirer les travailleurs et les jeunes – dont la colère s’ancre profondément dans les coupes budgétaires, le chômage, l’endettement des étudiants, les saisies de logements, les soins de santé, etc. – et parvenir à avoir des protestations beaucoup plus grandes, le mouvement doit se positionner clairement contre l’austérité brutale en cours d’élaboration au Congrès

En fait, le Congrès et Barack Obama nous donnent involontairement un point de ralliement idéal à destination d’unifier le mouvement Occupy et d’approfondir le soutien actif que nous avons dans les diverses communautés des travailleurs les plus touchés par les coupes d’austérité.

Après des années de compressions budgétaires sévères au niveau de l’Etat et au niveau local, désormais, le Congrès et Barack Obama se préparent à des coupes historiques dans la sécurité sociale fédérale. Le 23 novembre, un ‘Super Comité’ bipartite décidera du sort de centaines de milliards de dollars pour les programmes sociaux dont dépendent les personnes âgées, les malades, les pauvres, les étudiants, les travailleurs, les femmes, etc. La sécurité sociale, les soins de santé, le financement de l’éducation et d’autres programmes vitaux sont en pleine ligne de mire.

 

Occupy Congress!

Ces coupes budgétaires historiques exigées par les grandes banques et les grands actionnaires constituent la plus grande menace face à nous et face à la classe ouvrière américaine. Si l’ensemble du mouvement Occupy – y compris les syndicats – s’opposent résolument à ces attaques impopulaires et recourent aux tactiques d’action de masse et de mobilisations dans les communautés de travailleurs, il est possible de réduire considérablement l’impact de ces attaques, voire même de les vaincre. Imaginez ce que cela donnerait si, à travers le pays, des assemblées générales Occupy appellent les syndicats du secteur public et les groupes d’étudiants à organiser une action coordonnée de grève nationale contre les coupes, comme les assemblées l’ont fait en Grèce ! Même si de nombreux dirigeants syndicaux ont déjà refusé d’aller plus loin, le niveau de colère est tel que les travailleurs du rang, dans de nombreux secteurs, pourrait organiser elle-même les masses, comme les enseignants du Wisconsin l’ont fait le printemps dernier.

Imaginez ce que cela donnerait si le mouvement Occupy lancerait un appel à ‘‘Occuper le Congrès’’, à occuper les bureaux locaux des membres du Congrès à moins qu’ils ne signent un engagement à voter contre toutes les coupes proposées, en combinaison de manifestations, de pétitions, de meetings, d’actions,…

Il y a déjà une semaine d’action ‘‘Jobs Not Cuts’’ (Des emplois, pas de coupes) pour la semaine du 16 au 23 novembre, qui a reçu le soutien de personnalités telles que Noam Chomsky, mais aussi de syndicats, d’organisations locales, de Socialist Alternative et d’autres (voir JobsNotCutsProtest.org) Nous encourageons les assemblées générales Occupy à entériner ces actions et à orienter le mouvement vers une opposition active à ces coupes.

Soutenir cette campagne n’aura pas pour seul avantage de faire le lien entre le mouvement Occupy et la lutte, plus large, contre les coupes, cela aura l’avantage supplémentaire d’exposer davantage au grand jour le rôle du Parti Démocrate dans la promotion de ces coupes budgétaires. Ainsi, il sera plus difficile pour les Démocrates de tenter de récupérer l’énergie du mouvement pour sauver leurs candidats aux élections de 2012. Il sera important de miser sur l’énergie de cette lutte anti-coupes pour aller vers la présentation d’une réelle alternative pour les électeurs en 2012, en présentant des candidats anti-coupes indépendants, dans le cadre de la construction d’un nouveau parti politique pour et par les 99%.

Afin de maintenir notre élan, nous devons apprendre à nous adapter rapidement. Nous avons déjà changé le paysage politique de telle manière que le simple fait de répéter les tactiques et les slogans qui ont donné naissance aux occupations ne sera pas suffisant pour soutenir le développement du mouvement. Des millions de personnes se tournent vers nous afin de fournir un moyen concret d’aller de l’avant, de montrer un chemin vers un changement réel.

Exiger des réformes des institutions capitalistes ne signifie pas de mettre de côté les aspirations radicales du mouvement Occupy. En fait, notre tâche est d’expliquer que les réformes véritables sont toujours les produits de la lutte des masses, menaçant le pouvoir de la classe dirigeante. Nous avons déjà fait peur aux élites politiques et aux géants du capital. Si nous pouvons continuer à élargir notre influence, à coordonner nos actions et nos revendications et à fournir une stratégie claire pour toutes les couches de la société américaine prêtes à entrer dans la lutte, le sentiment que nous sommes «gagnant» va prendre chair et d’os.

 

  • Il faut étendre les occupations à travers le pays et vers les écoles et les collectivités. Nous avons besoin d’une campagne de masse pour mobiliser les couches larges de travailleurs, de jeunes et la base syndicale et les impliquer dans la lutte.
  • Organisons des manifestations de masse le week-end qui appèlent au retrait de toute coupe dans les services sociaux, à l’élaboration d’un programme massif de création d’emplois, à l’imposition de taxes sur les super-riches et le Grand Capital, à la fin des guerres, à des coupes massives dans le budget militaire et pour la défense des droits syndicaux et des droits démocratiques.
  • Construisons activement la mobilisation et la semaine d’action nationale du 16 au 23 novembre pour combattre le Super Comité du Congrès qui prévoit des coupes dans les services sociaux à hauteur de 1.500 milliards de dollars. Non aux pertes d’emploi !
  • ‘‘Occupy Congress’’: occupons massivement les bureaux locaux des membres du Congrès jusqu’à ce qu’ils ne signent un engagement à voter contre toutes les coupes antisociales proposées, avec également des manifestations, des pétitions, des meetings, des actions,…
  • Préparons-nous à proposer des candidats anticapitalistes issus de la classe ouvrière en 2012 pour s’opposer aux politiques des deux partis de Wall Street, en tant que première étape pour la constitution d’un nouveau parti des 99%, un parti des travailleurs de masse.
  • Non à la dictature de Wall Street! Plaçons les grandes banques qui dominent l’économie américaine sous propriété publique et gérons démocratiquement par l’élection de représentants des travailleurs et de la population. Des compensations pourraient être accordées aux petits investisseurs sur base de besoins prouvés, pas aux millionnaires.
  • Construisons le mouvement pour qu’il soit capable de remplacer ce système capitaliste pourri par le socialisme démocratique, pour créer une nouvelle société basée sur les besoins humains.