Economie mondiale: Climat morose – la tempête n’est pas près de s’arrêter

Une deuxième vague de recapitalisations bancaires a dû être lancée ces dernières semaines. Rien de tel pour montrer que toutes les précédentes interventions massives des gouvernements se sont déjà révélées insuffisantes. Histoire de continuer dans la même sombre atmosphère, les principales institutions économiques ont livré leurs derniers résultats pour l’année 2008, dont le dernier trimestre est qualifié de «catastrophique» : la production industrielle des principales économies mondiales s’est effondrée, avec la destruction d’emplois qui l’accompagne.

Aux Etats-Unis, le Produit Intérieur Brut a chuté de plus de 3% au cours du dernier trimestre et 2,6 millions de personnes ont perdu leur emploi en 2008. Cette déferlante désastreuse sur l’emploi ne fait que s’accélérer : 600.000 emplois ont été perdus pendant le seul mois de janvier aux USA. La zone euro ne s’en tire pas mieux. La Commission Européenne a revu ses prévisions de (dé)croissance pour 2009 à la baisse avec -1,9%. Ce même chiffre vaut aussi pour la Belgique selon la Banque Nationale (BNB).

Ce qui est impressionnant aussi dans ces chiffres, c’est la manière dont les prévisions précédentes des gouvernements se sont avérées largement trop optimistes : la dernière prévision de (dé)croissance pour 2009 par la BNB n’était encore que de -0,2% au mois de décembre ! On peut se demander si le pronostic de -1,9% n’est, lui aussi, pas encore sous-estimé… Car ce chiffre est avancé avec l’idée que 2009 sera mauvais mais que les plans de relance mis en place permettront aux économies de se relancer dès la fin de l’année. Cela est-il aussi évident ?

 

Des plans-miracles ?

Lors de l’éclatement de la bulle immobilière à l’été 2007, les gouvernements capitalistes ont refusé de voir l’ampleur de la crise qui s’enclenchait. A l’époque, ils pensaient que la solution pour sortir d’un simple choc dans les finances se trouvait dans le « découplage » (la théorie selon laquelle la Chine et les pays émergents allaient prendre le relais des économies américaines et européennes provisoirement défaillantes pour relancer la croissance mondiale). Cette fable s’est très vite révélée être un fantasme des capitalistes au vu de la violence avec laquelle la crise économique a frappé les exportations chinoises (une baisse de 17% l’an dernier) : les usines y ferment par milliers, les pertes d’emplois s’y comptent par millions. Cela vaut aussi pour l’ensemble des pays ‘émergents’.

Aujourd’hui, la solution-miracle, ce serait les plans de relance. Grâce à ceux-ci, les économies toucheraient le fond à la fin 2009 pour re-décoller ensuite. De quoi ces plans sont-ils constitués pour apparaître comme la grande solution à la crise du capitalisme ? Ils consistent principalement en investissements déjà planifiés et qui sont avancés et en instruments financiers divers destinés à « détoxifier » les institutions financières et bancaires.

Illustrons cela avec les plans américains (la formule est la même pour l’Europe comme pour la Wallonie). Le dernier plan US, baptisé pompeusement « Financial Stability Plan », est destiné au redressement du secteur financier. Il est constitué de 2.000 milliards de dollars répartis en trois secteurs. Un fonds public-privé rachèterait pour 500 milliards d’actifs toxiques : la collectivité sera donc priée de payer pour les arnaques réalisées par les banques (l’idée des « bad banks » va aussi dans ce sens). La Fed (Banque centrale américaine) rachèterait pour 1.000 milliards d’obligations émises par les banques, ces obligations étant accolées à des crédits à la consommation ; autrement dit, la Fed reprendra au compte de la dette publique pour 1000 milliards de dettes bancaires. Enfin, le reste de la note est surtout destiné à intervenir dans le capital de banques.

Quelques cacahuètes sont quand même distribuées aux familles surendettées par les crédits hypothécaires. Attention, il s’agit d’alléger ces dettes en les étalant dans le temps, et pas de les annuler, ce qui serait une source de pertes pour les banques. Les dirigeants de celles-ci devront, eux, faire le sacrifice d’un salaire annuel plafonné à 500.000 dollars(!) et démontrer l’existence d’une « structure financière saine ». Beau cynisme quand on sait que ces assainissements se concrétisent par la destruction d’emplois et la fermeture d’usines !

Ces plans n’offrent aucune solution aux travailleurs et assurent justement au patronat que la crise sera payée sur le dos des travailleurs ! Le plan Obama ne risque pas de changer cette donne: baisses d’impôts pour les classes moyennes, primes à la consommation de produits américains et « ambitieux » plan de développement d’un embryon de sécurité sociale « à l’européenne ». Il s’agit en fait d’une sécurité sociale à deux vitesses, dont l’une reste en 5e tandis que l’autre passe du point mort en première. Et cette première vitesse est bien fragile : tous ces plans vont creuser de manière vertigineuse une dette publique déjà colossale. Cette dette est une caractéristique essentielle de la crise d’aujourd’hui, raison pour laquelle certains économistes la nomment « la mère de toutes les crises ». Une telle dette finira par donner réalité au refrain que l’on a entendu ces dernières années – « les caisses sont vides, il faut se serrer la ceinture » – et qui a servi à justifier les attaques contre les acquis sociaux. Mais en s’envolant ainsi, cette dette va conduire l’Etat lui-même à la faillite, une situation dans laquelle se retrouve l’Islande aujourd’hui.

 

Ivresse, gueule de bois et cirrhose

La crise actuelle illustre les contradictions sur lesquelles le néolibéralisme a construit la croissance économique et qui sont à la base de la crise actuelle : des dettes immenses sur fond de fossé social. Face à cela, les « plans de relance » ne sont qu’une fuite en avant qui n’apporte aucune solution réelle à la crise du capitalisme. Peut-être permettront-ils de mettre un pansement sur une bulle spéculative qui a explosé mais la déflagration de la bulle est trop forte pour que ces plans puissent relancer la machine économique.

Cela vaut également pour la Chine, où un plan visant à développer un marché intérieur a été mis sur pied. Or c’est précisément sur la surexploitation des travailleurs chinois que la Chine a construit sa croissance ces dernières années, et ce n’est pas avec un « one shot » de liquidités qu’une crise structurelle pourra être réglée. Les gouvernements ne sont même plus capables de redonner confiance à leurs propres capitalistes : le lendemain de l’annonce du plan de Geithner, la bourse de New York a plongé de 5% ! Les spéculateurs sentent bien que, même avec les montants colossaux générés par les plans, les gouvernements sont incapables de percevoir l’importance de l’épidémie.

Le secteur automobile – qui constitue un bon baromètre de la consommation – illustre la crise de surproduction du capitalisme, avec des baisses de ventes oscillant entre 30% et 50% au cours de la dernière année. Dans la durée du temps de travail que prestent les travailleurs, une partie seulement est rémunérée sous forme de salaire. L’autre partie du temps de travail, et donc de la production, rémunère grassement les capitalistes avec les profits. La crise de surproduction découle ainsi du fait que les travailleurs ne sont pas capables de consommer l’entièreté de la production qu’ils ont réalisée. C’est pour tenter de faire face à cela que les immenses profits des dernières années ont été réinvestis sous formes de crédits bon marché accordés aux ménages, y compris les moins solvables.

Le tout est joué en Bourse, où la spéculation et son marché à la hausse permettent de continuer la fête, tant que cela se peut. Concrètement, cela se traduit en une réalité : les dettes immenses accumulées ces dernières années. La hausse du marché immobilier n’est pas infinie, et lorsque les prix se replient, ça signifie que la fête est finie : l’alcool ne faisant plus son effet, le capitalisme retombe dans ses contradictions les plus profondes et les dettes créées ces dernières années se cristallisent. La gueule de bois et la crise arrivent alors.

Tout ce mécanisme vaut aussi pour les banques. Les fonds propres d’une banque ne représentent qu’une partie minime de ses engagements : environ 5%. Ces fonds propres ont été fortement nourris par des placements dans des obligations risquées, comme les subprimes. Ces placements ont connu une dépréciation terrible lorsque les gens n’ont plus pu rembourser leurs dettes, ce qui a amené à la situation de l’automne dernier : les dépréciations d’actifs ont fait passer très rapidement les fonds propres de 5% à 2%. Et là, le spectre d’une faillite arrive très vite pour une banque. Aujourd’hui, des montants supérieurs à celui des subprimes se trouvent dans des placements juste un peu moins risqués que ceux-ci ; or, leurs échéances arrivent en 2009 et s’accélèreront jusqu’en 2011. Autant dire que l’effondrement des Bourses va transformer ces hypothèques « un cran moins risquées » en bombes à retardement.

Les gouvernements tentent donc de prendre en charge la grande détoxification des banques. En nationalisant les dettes tout en laissant le privé faire du profit : en 2008, les dirigeants des institutions financières se sont distribués pour 10 milliards de bonus après avoir été sauvés par le plan Paulson, c’est-à-dire par le contribuable américain. Ainsi, la cirrhose des capitalistes sera transmise aux travailleurs, de sorte que le patronat puisse assurer ses profits.

 

Un véritable programme anti-crise

Telle est la principale substance des plans de relance, avec quelques cacahuètes de « keynésianisme » pour relancer la consommation. De plus en plus d’économistes commencent à douter de l’efficacité de tels plans pour sortir de la crise, et avancent que les quelques semaines qui viennent seront déterminantes pour voir s’ils seront capables de fixer un plancher à la crise en 2009, ou si on se dirigera vers une réelle dépression pour les prochaines années. L’usine d’Opel à Anvers illustre un tel moment-clef.

Nous n’avons aucune confiance dans les plans de relance des gouvernements, que ce soit en Belgique, ailleurs en Europe ou aux Etats-Unis. Cette invention des capitalistes ne cherche qu’à faire payer la crise aux travailleurs, causant une explosion du chômage et des situations sociales terribles et inhumaines, comme l’illustre les quartiers devenus fantômes en Grande-Bretagne et aux USA suite aux expulsions de leurs habitants.

Le capitalisme se retrouve dans ses contradictions profondes en temps de crise : celle-ci est causée par l’exploitation des travailleurs, et la bourgeoisie ne peut sortir de cette crise qu’en accentuant cette exploitation !

 


Quelles solutions?

Notre plan anti-crise est notre programme socialiste, qui liquide le capitalisme et ses crises inhérentes qui démolissent les conditions de vie des travailleurs et de leur famille à travers le monde :

 

  • Tous les profits record des dernières années doivent être réinvestis dans des infrastructures socialement utiles et non dans la spéculation : construction massive de logements sociaux de bonne qualité, refinancement de l’enseignement.
  • Augmentation du pouvoir d’achat : rétablissement total de l’index, abolition de la TVA sur les produits de première nécessité.
  • Ouverture des livres de compte des entreprises, particulièrement pour celles qui licencient
  • Nationalisation sous contrôle des travailleurs du secteur financier et des secteurs clés de l’économie
  • Réduction du temps de travail à 32 heures, sans perte de salaire et avec embauche compensatoire.

Pour plus de précisions: Programme anti-crise : la seule issue est un plan de relance socialiste