Depuis la crise humanitaire des réfugiés, l’Union Européenne a tenté d’y faire face avec un système de quotas et en durcissant l’accueil des réfugiés économiques. Nous en avons discuté avec Saïd, membre actif de la coordination bruxelloise des sans-papiers.
Propos recueillis par Pietro (Bruxelles) pour l’édition d’octobre de Lutte Socialiste, le mensuel du PSL
Que penses-tu de l’approche de l’UE ?
‘‘L’Union Européenne essaye de résoudre des problèmes qu’elle-même a créés ! Ces sont les politiques impérialistes et les interventions militaires des puissances occidentales qui ont déstabilisé la région. Les quotas sont un moyen pour l’élite européenne de classer les gens. Cette stratégie vise à diviser les migrants entre les ‘‘bons’’ et les ‘‘mauvais’’ afin de pouvoir exploiter au maximum les réfugiés. L’exemple de l’Allemagne est très parlant : des réfugiés y travaillent déjà pour un euro de l’heure. C’est ce dont a besoin la classe dominante: de la main d’œuvre moins chère.’’
Que penses-tu des propos de la N-VA ?
‘‘Les propositions de la N-VA figuraient déjà auparavant dans les tracts du Vlams Belang, ils sont maintenant relayés par un parti de la majorité fédérale. La N-VA, pour ne pas perdre d’électeurs sur sa droite, lorgne vers les propos de l’extrême droite. Statuts spéciaux, déni d’accès au CPAS, dégressivité des allocations : ce sont des moyens de diviser les immigrés et de les rendre plus exploitables au bénéfice du patronat.’’
La coordination des sans-papiers a de suite décidé de tisser des liens avec les réfugiés ? Pourquoi ?
‘‘Tout d’abord pour dénoncer le gouvernement Michel qui n’a pas pris ses responsabilités concernant l’accueil des demandeurs d’asile. Des conventions internationales obligent la Belgique à organiser un accueil digne de ce nom pour les demandeurs d’asile. Pour appliquer l’austérité, les traités européens sont respectés à la lettre. Mais sur cette question, les autorités n’ont rien fait. Le gouvernement venait aussi de sabrer dans le financement public de l’accueil. C’est scandaleux ! Ce n’est pas une crise simplement humanitaire, elle est aussi budgétaire ! Les politiques d’austérité touchent toutes les couches faibles de la société, et parmi elles les migrants !
‘‘Nous savons aussi qu’environ 40% des demandeurs d’asile se verront refuser leur droit à l’asile. Que feront-ils ? Ils deviendront sans-papiers. Les réfugiés d’aujourd’hui sont les sans-papiers de demain ! Et pour les sans-papiers, il n’y a pas de plans B, il n’y a que l’exploitation. C’est pourquoi nous exigeons ça que la régularisation c’est la seule possibilité !’’
Qu’avez-vous concrètement fait pour tisser ces liens de solidarité avec les réfugiés du campement au Parc Maximilien ?
‘‘Nous avons essayé de les aider comme on pouvait : en organisant une cuisine mobile avec le collectif des sans-papiers collectactive, en proposant des films, de la musique et même une Radio. Nous avons aussi organisé des assemblées. Il nous paraissait fondamental de politiser le débat et de discuter avec les réfugiés de comment lutter pour nos droits ! Une démarche humanitaire est bien sûr nécessaire dans un premier temps mais sans perspective politiques, le mouvement n’a pas d’avenir ! Nous avons besoin d’une véritable stratégie pour nous lier au mouvement des travailleurs et créer des alliances avec les couches larges de la société pour aboutir à la régularisation.’’
Vous avez prévus une manifestation nationale le 25 octobre.
‘‘Oui, effectivement, nous bâterons le pavé ce jour-là, tous ensemble, sans-papiers, réfugiés, travailleurs avec ou sans papiers, avec ou sans emploi ! Nous devons être unis, avec les travailleurs, et ne pas nous laisser diviser par ce gouvernement. Bien sûr, notre revendication principale sera la régularisation, mais nous ne nous arrêterons pas là : il faut nous battre pour des logements pour tous, pour des emplois convenables, pour un accès digne aux soins de santé, etc. C’est pour ça que la coordination sera à côté du mouvement des travailleurs et des syndicats le 7 octobre ! Tous ensemble, nous pourrons chasser ce gouvernement et sortir des politiques d’austérité !’’
Manifestation ce dimanche 25 octobre, à 15h, Gare du Midi (Place Bara) à Bruxelles
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