Il y a maintenant 16 ans ouvrait le centre fermé de Vottem, un des six que compte le pays. Lorsqu’on emploie le terme «centre fermé», c’est bel et bien d’une prison dont on parle. Chaque année, ce sont près de 8.000 personnes qui y sont enfermées en attente d’une expulsion contrainte et violente. Le seul crime des personnes enfermées dans ces centres est d’avoir fui les guerres, la misère, les maladies et les discriminations en espérant trouver de meilleures conditions de vie sur le continent Européen.
Tract des Étudiants de Gauche Actifs
Par ailleurs, le caractère dégradant du traitement réservé aux détenus n’est plus à prouver : les faits de refus de soins sérieux abondent, la promiscuité et le manque de fournitures de bases sont la règle, de même que le recourt à l’intimidation (1), aux cellules d’isolement (entendez cachots) et le traitement des détenus en criminels dangereux lors de leurs transferts. Toutes ces méthodes n’ont qu’un seul but : briser la résistance des personnes internées en vue de leur expulsion.
Sous le Gouvernement Di Rupo, Maggie De Block, alors secrétaire d’État à l’asile et à l’immigration, avait déjà largement durci le système de politiques migratoires belge. Sous son ministère, les régularisations sur base de raisons médicales sont passées de 50% à 2% (2), une liste de «pays d’origine sûrs» permettant une procédure accélérée – et un refus quasi certain – a été établie, et les premiers rapatriements collectifs ont été effectués. Il ne s’agit ici que de quelques exemples.
Aujourd’hui, le gouvernement Michel Ier, en la personne de Théo Francken, a décidé d’aller plus loin. De manière assez laconique, l’accord de gouvernement précise : «les centres fermés seront étendus», et ce sans perdre de temps puisque l’objectif actuel est de créer 100 places supplémentaires dans les centres fermés pour l’année 2015, afin de pouvoir augmenter la capacité d’expulsion de 1000 personnes par an (3). La création d’ailes destinées aux familles (et donc aux mineurs) est également à l’ordre du jour (4). Par ailleurs, la procédure d’expulsion des personnes s’étant rendues coupables de petits méfaits tels les vols à l’étalage va être accélérée. Et tout en annonçant ces mesures scélérates, le cabinet Francken se gausse en annonçant avoir augmenté de 20% le nombre d’expulsion pour le dernier trimestre de 2014 !
A l’échelle européenne, la création de l’agence Frontex met en évidence l’approche répressive (et ici carrément militarisée) de la question des migrations. L’exemple des opérations du type Mos Maiorum, qui ont lieux à intervalles réguliers en Europe (5), est probant.
Or, il apparait clairement que l’approche répressive en matière de migrations est aussi criminelle qu’elle est inefficace.
Criminelle car le renforcement des contrôles frontaliers pousse les migrants à prendre toujours plus de risques pour éviter ces contrôles, en témoignent les innombrables drames en mer méditerranée (au moins 3.400 morts en 2014) (6) ; mais aussi car chaque années, des migrants sont renvoyés manu militari vers des pays où leur vie est en danger car ils ne remplissent pas les critères de régularisation mis en place par l’État.
Inefficace car, d’une part, ni le renforcement des politiques répressives ni la multiplication des campagnes de dissuasion au cours des dernières années n’a fait diminuer les flux migratoires ; et car, d’autre part, l’histoire des migrations nous enseigne qu’aucune campagne de dissuasion, aucune répression et aucun contrôle des frontières n’ont jamais empêché les hommes de fuir des conditions de vie devenues intenables tant qu’il était possible d’espérer trouver mieux ailleurs.
Par ailleurs, il n’est pas rare que les migrants qui arrivent sur le sol européen mais qui se voient refuser leurs papiers tombent dans les mains de patrons peu scrupuleux ravis de profiter de leur détresse et de leur absence de droits pour les transformer en une main d’œuvre taillable et corvéable à merci. Cela instaure de plus une pression à la baisse sur l’ensemble des conditions de travail et de salaire.
Dans ce cadre, seul l’arrêt total des politiques impérialistes et néocoloniales dans les pays du monde néocolonial ainsi que le soutien aux luttes pour l’émancipation des masses et pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes sans ingérence des puissances impérialistes, qu’elle soit politique ou économique, peut fournir une réponse adéquate à la croissance des flux migratoires et offrir à chacun la chance de se construire un avenir sans avoir à connaitre les affres de la migration.
En Belgique, les Étudiants de Gauche Actifs et le PSL défendent la régularisation de tous les sans-papiers et la fermeture de tous les centres fermés sur base de luttes actives à l’image de celles qu’ont connues les années 2004-2005.
C’est aux multinationales qu’il faut s’en prendre, par à leurs victimes !
Travailleurs, belges et immigrés, avec ou sans papiers, tous unis dans la lutte !
Notes
(1) A ce titre voir «La tension monte au centre fermé de Bruges» In : AlterEchos, n°362 (Juin 2013)
(2) http://www.rtbf.be/info/belgique/detail_une-raison-medicale-ne-donne-plus-que-rarement-acces-a-la-regularisation?id=7824793
(3) Le Soir, 14/10/2014
(4) Le Soir, 14/10/2014
(5) http://www.rtbf.be/info/monde/detail_fin-de-mos-maiorum-une-operation-policiere-europeenne-tres-critiquee?id=8388085
(6) http://www.liberation.fr/monde/2014/12/10/pres-de-3-500-migrants-sont-morts-en-mediterranee-cette-annee_1160617