Un phénomène comme Aube Dorée peut-il se produire en Belgique ?

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Manifestation contre la venue de marine le Pen à Bruxelles, mai 2014. Photo : PPICS

Dans le cadre de la mobilisation vers la manifestation contre le racisme et l’extrême-droite qui se déroulera le 9 novembre prochain à Bruxelles, nous avons discuté avec Geert Cool, porte-parole de notre campagne antifasciste Blokbuster / Résistance Internationale au sujet de l’extrême-droite en Europe et chez nous. Cette manifestation du 9 novembre est organisée pour répondre à un appel lancé par les comités antifascistes grecs qui se sont organisés pour riposter face à la croissance du parti néonazi Aube Dorée. Il est largement connu que cette formation d’extrême-droite est impliquée dans des meurtres, mais elle se maintient pourtant à 10% aux élections et dans les sondages.

Interview de Geert Cool
Comment se fait-il qu’Aube Dorée ait pu atteindre un tel score et s’y maintenir ?
“La crise économique a élu domicile en Grèce plus que partout ailleurs. L’économie s’y est contractée d’un tiers depuis le début de la crise, le taux de chômage a augmenté de 27% et, parmi la jeunesse, il est désormais bien au-delà des 50%. Ceux qui disposent encore d’un emploi gagnent jusqu’à 30% de moins qu’avant la crise. En matière de santé, pas moins de 40% des budgets ont été supprimés depuis 2008.
‘‘La résistance a été forte, avec de nombreuses grèves générales. Mais la lutte n’a pas été en mesure d’aller de l’avant. L’impatience et la frustration se sont donc développées, ce qui a ouvert la voie à des forces comme Aube Dorée. Trotsky disait au moment du développement du fascisme en Allemagne dans les années ’30 que ‘‘lorsque la crise revêt une gravité insupportable, un parti se met en avant, avec le but déclaré de chauffer à blanc la petite bourgeoisie et de diriger sa haine et son désespoir contre le prolétariat. En Allemagne, cette fonction historique est remplie par le national-socialisme, large courant dont l’idéologie se forme à partir de toutes les exhalaisons putrides de la société bourgeoise en décomposition.’’ Il a ajouté que cela n’avait été rendu possible que parce que le mouvement des travailleurs n’avait mis en avant aucune mesure résolue pour lutter contre le capitalisme.
‘‘L’arrivée au pouvoir du fascisme n’est pas encore imminente en Grèce, mais Aube Dorée peut capitaliser sur le désespoir des couches perdues par le mouvement des travailleurs et même attirer un certain nombre de travailleurs pour les lancer contre le monde du travail. Et sa base idéologique est effectivement composée de toute la pourriture d’une société en plein désintégration.’’
N’est-ce pas une situation tout à fait grecque ? Chez nous l’extrême-droite semble disparaître…
‘‘La Belgique n’est pas isolée du contexte économique européen. Nous ne sommes pas dans une période où il sera évident d’améliorer le niveau de vie de la majorité de la population. L’autorité de toutes les institutions bourgeoises est minée. Dans ce contexte, il existe un espace électoral pour les forces d’extrême-droite. Il suffit de regarder la France, où le Front National et Marine Le Pen continuent d’obtenir des résultats élevés, et même à être le plus grand parti au niveau électoral.
“En Belgique, nous sommes à l’aube d’une confrontation ouverte entre la politique d’austérité et le mouvement des travailleurs. Tout au long de cette lutte, il sera possible à ce dernier de prendre des initiatives politiques pour renforcer le mouvement social. Mais si le mécontentement n’est pas suffisamment reflété dans la résistance active, l’espace peut grandir pour un vote de protestation, y compris à l’extrême droite.
‘‘En Flandre, dans l’entourage du Vlaams Belang, il n’est pas impossible que la moindre attention médiatique dont bénéficie le parti ouvre la voie à des méthodes directement inspirées d’Aube Dorée (voir l’article sur le nouveau président du VB).’’
Que pouvons-nous faire ?
“‘Blokbuster est actif dans la lutte contre l’extrême droite depuis 1991. Nous avons toujours lié ce combat à la lutte contre le chômage, pour des logements sociaux, de bons services publics,… en tant que réponse basée sur la solidarité face à la logique de division raciste, homophobe ou sexiste. Dans l’actuel contexte de crise économique profonde, cela est plus nécessaire que jamais. Avec des initiatives telles que la journée d’action du 9 novembre, nous voulons lier la question de la solidarité internationale à celle de la lutte à mener en commun pour un meilleur avenir. Participez à cette campagne vous aussi !’’