La population Rom est estimée entre 10 et 12 millions en Europe, ce qui en fait la plus importante minorité européenne. Ils sont surtout présents en Roumanie et en Bulgarie, où on compte respectivement 2 400 000 et 800 000 Roms. Bien que ces deux pays fassent partie de l’Union Européenne, leurs ressortissants ne jouissent pas encore de la libre circulation dans certains pays européens dont la France. Ils ont besoin d’un permis de travail et d’un titre de séjour pour y séjourner plus de 3 mois. Or pour qu’ils travaillent légalement en France, leurs employeurs doivent payer 893€ à l’Agence Nationale d’Accueil des Etrangers et des Migrations. Cette dissuasion oblige les Roms à travailler au noir, et donc à accepter les plus bas salaires et les pires conditions de travail, et sinon à vivre de mendicité.
Les expulsions de Rom existaient donc déjà avant que Sarkozy lance sa campagne anti-Roms, elles représentaient même un tiers des reconduites à la frontière en 2008. Elles ont augmenté et se sont faites plus violentes, avec destructions des biens des Roms et fichage ADN illégal. Les mairies font expulser les camps illégaux, alors que la moitié d’entre elles sont dans l’illégalité en ne mettant pas à disposition des terrains d’accueil pour les nomades. Après ces annonces, les racistes se sont décomplexés et des riverains ont entrepris de vider eux-mêmes les camps nomades à plusieurs reprises cet été. Le 29 octobre, un groupe d’individus cagoulés armés de fusils et de matraques et «habillés comme des policiers» a attaqué un camp nomade dans les Yvelines, tabassé les Roms et volé les papiers de certains d’entre eux.
Les Roms sont originaires du Nord-est de l’Inde et sont arrivés en Valachie (actuelle Roumanie) et en Moldavie au XIIIème, siècle. Leur peuple a alors été réduit en esclavage par les boyards (seigneurs féodaux) et par les monastères, jusqu’au XIXème siècle. En 1818, le code pénal de Valachie stipulait que «tous les tziganes naissent esclaves». A cette époque, des Roms affranchis ou évadés forment des communautés dans les montagnes des Carpates. Ils sont vus comme des héros par les autres esclaves. Ils mènent une guérilla contre les barons Roumains jusqu’en 1864, date de l’abolition de l’esclavage. Mais après leur émancipation, les Roms continuent à vivre dans la misère, en marge de la société Roumaine. C’est alors que certains immigrent pour se disperser en Europe. Pendant la deuxième guerre mondiale, le génocide des nazis contre les Tziganes s’est élevé à 800 000 morts.
Sous le stalinisme, des plans ont été mis en œuvre pour sédentariser les Roms. Des organisations étaient créées spécialement pour leur créer des emplois, leur trouver des logements et pour l’alphabétisation. En Hongrie, il y avait des coopératives et des Kolkhozes spécialement pour les Roms et dirigées par eux. En Pologne, les médias devaient réserver un temps pour parler de la culture et des actualités Roms, et faire de la propagande contre la xénophobie. Mais la sédentarisation n’avançait pas assez vite parce que les Roms voulaient conserver leur culture et l’organisation de leur camps, et à partir des années 60 les partis communistes ont employé la répression : les Roms pouvaient être emprisonnés pour nomadisme.
Après la chute du stalinisme, quand les entreprises d’état ont été démantelées, le chômage de masse est réapparu chez les Roms. Aujourd’hui 56 à 80% des Roms Bulgares et 75% des Roms Roumains sont sans emploi. Ils sont discriminés à l’embauche, mais aussi parfois dans les services publics : en Bulgarie la moitié d’entre eux ne sont pas couverts par l’assurance maladie qui est censée être universelle, en Slovénie et en République Tchèque les enfants sont mis d’offices dans les classes pour enfants déficients. En Roumanie et en Hongrie, beaucoup vivent dans des bidonvilles sans eau ni électricité. L’oppression qu’ils subissent dépend des conditions économiques de leur pays. En Roumanie où la crise économique était dramatique, ils ont été victimes de lynchages et d’incendies de leurs maisons pendant toutes les années 90, accusés notamment d’être des agents de la Securitate, la police de Ceausescu. En Hongrie, très fortement touchée par la crise économique actuelle, le parti d’extrême droite Jobbik a obtenu 16% des voix aux législatives de 2010 (le double de son score aux européennes 2009). Ce parti dispose d’une organisation para-militaire qui a plusieurs meurtres de Roms à son actif, couverts par la police locale (en juillet 2009, unnfant Rom a été autopsié avec 17 balles dans le corps et la police «n’a pas conclu à un meurtre par balle»).
Besson vient d’accorder une aide d’un million d’euros à la Roumanie pour l’intégration des Roms. La Roumanie est gravement touchée par la crise économique : en un an le chômage a doublé pour atteindre 8% et la production industrielle a diminué de 6%. Pour rembourser un emprunt de 20 milliard d’euros au FMI, le gouvernement Roumain va mettre en place un plan d’austérité catastrophique pour les travailleurs : suppression de 100 000 postes de fonctionnaires, réduction de leurs salaires de 25%, diminution de 15% des allocations chômage… Comment la situation des Roms pourrait-elle s’améliorer dans ces conditions alors qu’ils ont un taux de chômage de 75% et qu’ils sont les derniers à accéder aux services publics ? Sous le capitalisme, ils seront toujours laissés en marge de la société et du marché du travail, et utilisés comme boucs émissaires pour diviser les travailleurs. Pourtant les richesses existent pour permettre aux Roms de vivre décemment sans abandonner leur culture. Les syndicats Roumains parlent d’une grève générale contre le plan d’austérité, et les Roms devraient se joindre à cette lutte avec leurs revendications. Les Roms ont déjà montré qu’ils pouvaient s’organiser politiquement, comme récemment en Slovaquie où ils ont manifesté pour leurs droits sociaux. En France, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont manifesté le 4 septembre contre politique raciste de Sarkozy et le mouvement contre la casse des retraites a prouvé que ses tentatives de détourner l’attention des travailleurs avaient échoué.