[DOSSIER] Enseignement flamand : Renforçons la lutte !

Gréve des étudiants du secondaire à Gand, ce 22 octobre, avec la participation de 800 étudiants.
Gréve des étudiants du secondaire à Gand, ce 22 octobre, avec la participation de 800 étudiants.

En Flandre, le gouvernement régional est la copie conforme du gouvernement fédéral : un gouvernement de droite dure qui veut frapper fort et vite. C’est dans ce cadre que l’enseignement a été visé, et qu’une mesure hautement symbolique a notamment été annoncée : l’augmentation du minerval. La ministre de l’Enseignement Crevits a ainsi annoncé une augmentation du minerval de plus de 270 euros, jusqu’à atteindre les 890 euros par an.
Lettre ouverte de nos camarades flamands d’Etudiants de Gauche Actifs (Actief Linkse Studenten) à la communauté de l’enseignement, aux parents et à l’ensemble du personnel, enseignant ou non.

Nous savons qu’il y a parmi les étudiants, un courant en faveur des économies et du relèvement du minerval. Il est représenté par des cercles tels que le KVHV (Katholiek Vlaams Hoogstudenten Verbond) et le LVSV (Liberaal Vlaams Studentenverbond). Ces individus veulent un retour à l’enseignement élitiste d’avant la première guerre mondiale. L’émancipation de l’enseignement ne va, pour eux, pas plus loin que la question linguistique. Pour le reste, leur vision rejoint subrepticement celle de la bourgeoisie francophone d’avant-guerre. Expriment-ils une opinion qui vit parmi de larges couches d’étudiants ? C’est tout le contraire que nous pouvons déduire des diverses mobilisations, mais nous ne pouvons nier que ces organisation de droite de fils-à-papa bénéficient d’un bon accès aux médias.
Les premières actions des étudiants et lycéens contre l’augmentation du minerval et les autres mesures d’austérité dans l’enseignement étaient prometteuses. Plusieurs milliers d’étudiants ont signé la pétition contre l’augmentation du minerval. Les lycéens à Gand ont organisé leurs premières manifestations et sit-in en septembre. Ensuite, des journées d’action coordonnées avec sit-in et grèves ont suivi en octobre dans plusieurs écoles. Même dans les universités et les écoles supérieures, il y a eu des actions de protestation au début de l’année académique. Elles visaient essentiellement à attirer l’attention des médias, mais nous espérons que des actions de mobilisation des étudiants du supérieur suivront bientôt, comme cela a été le cas pour les étudiants du secondaire.
scholierengent
Construire la résistance d’en bas par une implication maximale
Nous ne nous faisons aucune illusion sur le caractère de ce gouvernement : il ne supporte aucune contradiction à sa politique d’austérité dure. S’il ne se donne déjà pas la peine de se concerter avec les syndicats, comment écouterait-il les étudiants et lycéens ? Pour stopper ses coupes budgétaires, il faudra donc plus que quelques manifestations, actions symboliques ou concertation pour faire connaître notre mécontentement. Cela n’empêchera pas ce gouvernement de dormir. Il nous faudra le type de résistance qui pourra imposer nos revendications. Seule une résistance de masse portée par un large front de lycéens, d’étudiants, de membres du personnel et de parents avec un programme qui se prononce contre toute mesure d’économie sur le dos des jeunes et de la population active est en mesure d’y parvenir.
Construire un tel mouvement ne se fait pas du haut vers le vas, avec quelques personnes isolées et des actions imposées d’en haut. Il est important que les étudiants et lycéens n’en soient pas réduits à de simples spectateurs d’un mouvement en leur nom, mais soient au contraire activement impliqués dans le processus de décision et la poursuite de la construction du mouvement.
EGA_gand_greve02C’est ainsi que le mouvement des étudiants au Québec en 2012 a pu mener un combat de longue haleine jusqu’à ce que le gouvernement soit démis et le projet d’augmenter le minerval soit annulé. Les étudiants organisaient régulièrement des assemblées générales pour lesquelles ils mobilisaient massivement et au cours desquelles les personnes présentes décidaient tant de la forme des actions que de la plateforme des revendications et du programme. Cette méthode a été instaurée par un nouveau syndicat des étudiants CLASSE, initialement contre le goût des associations d’étudiants plus anciennes comme la FECQ et la FEUQ qui, après le mouvement étudiant de 2005, avaient marqué leur accord aux mesures d’austérité dure.
Même aujourd’hui, en Flandre, nous constatons dans le mouvement étudiant qu’il y a de fortes réticences à tenir des assemblées générales. Pourtant, le succès de telles assemblées, surtout quand elles sont liées à un plan d’action concret, est démontré par les comités d’action des lycéens à Gand. Tout de suite après leur première action du 10 septembre déjà, les 80 participants démarraient sur base de cette méthode avec un micro ouvert pour mener la discussion sur la poursuite du mouvement. Des comités d’action ont été mis sur pied dans différentes écoles et la manifestation qui a suivi le 8 octobre a réuni quelques 500 participants. La grève des lycéens du 22 octobre comptait 800 participants et poursuivait sur la lancée de cette méthode démocratique.
Il est nécessaire pour la dynamique d’un mouvement de stimuler la discussion et le débat. Non seulement en vue de garantir une implication la plus large possible mais aussi pour enrichir le débat et renforcer la lutte.
Contre toute la politique d’austérité
Dans une telle lutte, il faudra convaincre ceux qui ne le sont pas. C’est impossible en limitant nos revendications au minerval et aux autres mesures d’économie qui touchent directement les étudiants. L’augmentation du minerval n’est qu’une partie d’une attaque antisociale généralisée contre les droits et revenus de toute la classe des travailleurs.
Cela s’inscrit complètement dans le cadre de ce gouvernement qui veut faire payer la crise aux jeunes et aux travailleurs. Les riches restent hors d’atteinte. Nous devons faire ce lien. Une attaque contre l’un de nous est une attaque contre tous !
Ce n’est qu’en cherchant l’unité des jeunes et des travailleurs que nous pourrons construire un mouvement suffisamment fort pour contrer cette attaque généralisée. Si nous ne le faisons pas, nous laisserons l’espace à l’argumentation de droite. Si l’un doit économiser pourquoi pas l’autre ? Nous serons très vite enfermés dans une logique d’austérité dont la fin ne sera plus en vue. Une argumentation politique forte contre chaque forme d’économie sur le dos des jeunes et des travailleurs n’est pas seulement utile pour nous armer contre la droite et les partisans des économies mais aussi pour pouvoir répondre aux questions des jeunes qui doutent encore.
Depuis le début, les Etudiants de Gauche Actifs opposent l’achat de 40 nouveaux avions de chasse F35 pour un montant de 6 milliards d’euros aux mesures d’austérité du gouvernement flamand dans l’enseignement. Un seul F35 coûte environ autant que ce que doit rapporter l’augmentation du minerval ! Dans le comité d’action contre l’augmentation du minerval, il y avait au départ des contre-arguments, même Comac (l’organisation de jeunesse du PTB) estimait que la comparaison ‘‘visait trop haut politiquement’’. Entre-temps, tout le monde concède que c’est un véritable argument. C’est justement avec ce type d’exemples que l’on peut mettre en évidence que l’attaque contre l’enseignement supérieur est bien un choix idéologique.
Le mouvement doit partir des besoins à satisfaire : il nous faut plus de moyens publics, pas moins ! Nous devons combattre l’augmentation du minerval mais également réclamer plus de moyens publics pour l’enseignement, à commencer par un retour à une situation où 7% du PIB est consacré à l’enseignement. Les syndicats l’exigent depuis des années déjà, et cela est aussi systématiquement défendu par les Etudiants de Gauche Actifs.
Des gouvernements d’austérité à tous les niveaux qui touchent presque tous les travailleurs et allocataires sociaux offre le potentiel d’un mouvement généralisé. Les jeunes peuvent jouer un rôle très important pour dynamiser la protestation. Nous l’avons vu avec les Marches des Jeunes pour l’Emploi en 1982 et 1984 ou avec les grèves de lycéens contre le gouvernement Martens VI en 1986. Les jeunes vont plus facilement en rue, mais pour forcer l’establishment capitaliste à faire des concessions, nous devrons frapper là où ça fait mal, dans leurs profits, en mettant toute la société et l’économie à l’arrêt ! C’est pourquoi, des actions de grève sont si importantes et pourquoi nous devons renforcer les liens avec le mouvement ouvrier. En dénonçant directement toute la politique d’austérité, il est plus facile de faire des liens avec la protestation du mouvement ouvrier.
Propositions concrètes
EGA_gand_greve03Les Etudiants de Gauche Actifs appellent à un plan d’actions locales lié à des assemblées générales dans autant d’écoles, de hautes écoles, d’universités et de facultés que possible, dans toutes les villes.
Les syndicats appellent à un plan d’action avec des manifestations nationales, des grèves régionales et finalement, une grève générale. Suivons le même rythme avec les lycéens et les étudiants en organisant les mêmes jours des manifestations et des grèves de lycéens et d’étudiants. La lutte des travailleurs contre le relèvement de l’âge de la pension ou le saut d’index concerne aussi la jeunesse ! Inversément, la lutte des jeunes contre l’austérité dans l’enseignement est aussi celle des travailleurs.
Ce n’est encore qu’un début, mais le potentiel pour un mouvement commun n’a pas été aussi grand depuis longtemps. Nous ne devons pas laisser une chance à ces gouvernements de droite pour jouer avec notre avenir. Prenons notre avenir en mains en construisant un mouvement qui nous débarrassera de ces gouvernements pour faire place à une alternative au centre de laquelle seront placés les besoins de la majorité de la population.
Pour cela, nous devrons prendre l’argent où il est, auprès des 1 % de super-riches. Les Etudiants de Gauche Actifs sont en faveur d’une alternative socialiste au capitalisme, le système actuel n’offre aucun avenir à la majorité des jeunes.
Photos : Grève écolière de ce mercredi 22 octobre