RESTEZ CHEZ VOUS ! Voilà la mesure prise avec une certaine hésitation par le gouvernement belge, pour lutter contre l’actuelle pandémie de Covid-19. Cependant, depuis 2008, la situation du logement en Belgique n’a cessé de se dégrader. Si les pratiques spéculatives des investisseurs privés dans le secteur du logement ont été au cœur du krach boursier de 2008, aucune mesure concrète n’a été mise en place depuis pour remédier aux défauts systémiques qui avaient laissé cette situation se détériorer. Au contraire, les mesures d’austérité mises en œuvre pour “surmonter” la crise n’ont fait que renforcer les pratiques spéculatives et les tendances monopolistiques du secteur privé, en soutenant la privatisation et la gentrification. Cela a poursuivi et renforcé la marginalisation sociale et économique d’une couche toujours plus grande de la population.
Nous sommes confrontés à un manque important de logements abordables et décents ;cela se fait particulièrement ressentir parmi les hommes et les femmes aux études, jeunes travailleurs et d’autres groupes vulnérables, comme les mères célibataires et les migrants. Le prix des loyers pour une petite chambre dans des maisons partagées, souvent surpeuplées, est en moyenne de 365 euros par mois à Louvain, Liège et Gand et même de 400 euros par mois à Bruxelles. Les étudiants et les travailleurs sont contraints de vivre dans des conditions précaires et inadéquates. Le chauffage et les sanitaires sont souvent obsolètes, voire inexistants, ce qui constitue une grave menace pour la santé physique et mentale de nombreux jeunes.
Dans le même temps, les propriétaires d’immeubles de kots et les sociétés de logement réalisent des profits de plus en plus importants grâce à des pratiques spéculatives et à des loyers de plus en plus élevés. La hausse des prix des loyers, qui s’est accompagnée d’une stagnation des salaires, a obligé les travailleurs et les étudiants à y consacrer en moyenne 30 à 40 % de leurs revenus mensuels, mais pour ceux qui ont de faibles revenus, cela peut souvent dépasser 50 %. Cela laisse beaucoup de personnes dans l’impossibilité de faire face aux besoins les plus élémentaires, pousse de plus en plus de monde vers la pauvreté, à prendre un travail à temps partiel supplémentaire et le manque d’accessibilité des logements ne permettent pas à certains de sortir d’environnements sociaux abusifs. On constate ainsi une forte augmentation du nombre de jeunes contraints de vivre avec leurs parents ; c’est aujourd’hui le cas pour 1/3 des 25-30 ans. D’autres ne peuvent quitter leur partenaire, même en cas de violences. Pour de nombreux jeunes, et notamment pour les jeunes LGBTQI+ et les femmes, il n’y a souvent guère d’autre choix : soit ils acceptent leurs conditions de vie dans leur foyer, y compris dans les cas pas si rare de violences et de discriminations, soit ils font fasse a des arrangements inégaux et souvent abusifs avec leurs propriétaires.
Cependant, beaucoup d’autres ne peuvent se permettre aucune de ces options, comme en témoigne l’explosion du nombre de sans-abri dans la plupart des villes belges, certaintes doublant voire même quadruplant leur population de sans-abris. Bruxelles est certainement l’un des exemples les plus frappants avec quatre fois plus de sans-abri au cours de la dernière décennie. dont ¼ a moins de 25 ans. En fait, parmi les personnes vivant dans l’extrême pauvreté dans ce pays, beaucoup sont des jeunes et des migrants qui, par diverses formes d’exclusion économique, que ce soit le manque d’emploi (sans allocation de chômage) ou l’absence de régularisation, sont en proie à des pratiques d’exploitation et à des conditions de vie insalubres.
La pandémie de Covid-19 montre clairement l’urgence de la crise du logement, car des milliers de personnes ne sont pas en mesure de tenir les réglementations de distanciation sociale en vivant dans des logements insalubres et surpeuplés. Les dommages physiques et psychologiques profonds que l’exposition prolongée à de telles conditions de vie cause aux jeunes rappellent constamment l’incapacité du système actuel à répondre aux besoins fondamentaux des membres les plus précaires de la société. La pandémie actuelle a permis de mettre en avant des problèmes rencontrés par de larges couches de la population. Nous devons veiller à ce que tout le monde ait accès à un logement décent et abordable si nous voulons vraiment commencer à nous attaquer aux crises sociales et sanitaires systémiques.
Les droits fondamentaux comme le logement ne doivent pas être laissés aux pratiques spéculatives du secteur privé, mais doivent être démocratiquement contrôlés par la population. C’est pourquoi nous exigeons :
- La suspension temporaire immédiate du paiement des loyers, des services publics et des hypothèques pour les personnes incapables de payer. La création d’un fonds d’urgence pour soutenir les personnes sur la base de besoins avérés.
- La création de logements publics abordables. Tout d’abord, les espaces de vie actuellement vides doivent être mis entre les mains de la collectivité afin d’accorder un logement à tous ceux et celles qui en ont un besoin immédiat. Ensuite, nous avons besoin d’un programme à long terme de construction et de réhabilitation des infrastructures vides et inadéquates pour répondre au manque de logements abordables.
- Logement immédiat pour toutes les victimes d’abus physiques et psychologiques, les sans-papiers, les mal-logés et les SDF. Cela peut être facilement réalisé par l’utilisation d’installations vides, comme les hôtels et les centres de vacances, en raison de la pandémie.
- Les universités doivent prendre leurs responsabilités dans l’hébergement des étudiants, nationaux et étrangers, et garantir à tous l’accès à un logement abordable et décent. Le logement des étudiants doit être fourni directement par l’université, et non par des agences privées spéculatives. Et ses maisons d’étudiantes doivent être sous le contrôle démocratique des étudiants.